
Sandrine Gourlet
Elle préside depuis mai 2024, aux destinées du Grand Port Maritime. Forte d’une riche expérience dans le domaine de l’aménagement et des transports, Sandrine Gourlet ne craint pas les défis et fait de la concertation sa marque de fabrique.
Publication : mars 2025 / Texte : Philippe Guerry / Photo : © Julien Chauvet
On sait qu’on est Rochelais quand on s’enrhume dans les tribunes du stade Marcel Deflandre. Le jour de notre rencontre, Sandrine Gourlet pouvait donc s’enorgueillir de sa parfaite intégration dans la cité. Mais il semble falloir plus qu’un rhume pour entamer la détermination de la nouvelle présidente.
Cela fera bientôt un an que vous avez été nommée à la présidence du Directoire du Grand Port Maritime. Comment s’est déroulée cette première année ?
Il faut souligner que je suis arrivée dans un établissement public qui fonctionnait très bien, à la suite de Michel Puyrazat. Les équipes sont bien formées, compétentes, motivées et cela facilite les choses. Mon mandat est de poursuivre la transition du Grand Port Maritime, avec de la rigueur dans la gestion, et du volontarisme quant à nos ambitions. J’ai élaboré le Projet stratégique 2025-2029, et la première chose à laquelle je me suis consacrée en arrivant à La Rochelle a été de rencontrer tous les acteurs de la place portuaire, pour comprendre les métiers et les spécificités de chacun, aussi bien en interne que dans les entreprises présentes sur le port.
La concertation, c’est votre marque de fabrique ?
Oui, ça a toujours été ma façon de travailler. Dans mes fonctions précédentes, j’ai eu à mener beaucoup de projets pour lesquels nous étions en phase préalable de concertation et de débat public. C’est donc une pratique en laquelle je crois : je n’arrive pas avec des décisions déjà prises – ce qui ne veut pas dire que je n’ai pas mes idées et des orientations à défendre – mais j’aime partager, avoir l’avis des autres, coconstruire et nourrir ma prise de décision. Cela a pour vertu que les choix qui sont faits sont mieux compris, mieux acceptés et plus efficaces à mettre en œuvre.
Vous dévoilerez bientôt le Projet Stratégique 2025-2029 du GPM. Quelles seront ses orientations ?
En tant qu’établissement public, nous avons à respecter certains engagements pris à l’échelon national, qui sont autant de passages obligés : prévoir nos investissements sur 5 ans, notre trajectoire financière, nos orientations environnementales, etc. Sur cette base, nous allons renforcer certaines des spécificités déjà engagées à La Rochelle, comme aider au déploiement d’énergies décarbonées, avec l’éolien en mer ou la solarisation des bâtiments, ou renforcer notre résilience, face à des enjeux de sûreté et de protection de nos équipements, mais aussi de souveraineté, dans un contexte géopolitique compliqué.
Comment imprime-t-on sa marque sur un projet de cette envergure ?
(rires) Je n’ai pas de revendications personnelles ! Je ne cherche pas à planter un drapeau pour affirmer « c’est moi qui l’ai fait ». Je pense que c’est surtout dans la méthode, la façon de faire que je peux apporter ma patte. J’ai souhaité que l’ensemble des collaborateurs du port soit impliqué dans les réflexions, que l’animation de ces discussions soit faite par les chefs de service, au plus près des équipes. Et ça fonctionne : on a vu des propositions sortir qui n’étaient pas celles initialement envisagées par notre comité exécutif. J’ai évidemment mis sur la table des sujets qui me semblent des pistes intéressantes pour le port, comme le développement d’une filière de maintenance de bateaux ou le transport vélique – les cargos à voile – pour lesquels je crois en des possibilités de développement local, y compris en matière de formation. Mais mon apport principal repose sur la méthode de gouvernance.
Qu’est-ce qui vous a motivée à accepter ce poste, à ce moment de votre carrière ?
Ce poste, je l’ai voulu. Prendre la tête du GPM de La Rochelle répondait à beaucoup d’envies professionnelles : travailler sur un seul site, avec des équipes soudées, un projet de territoire extrêmement motivant et toute une dynamique derrière, avec des élus et des chefs d’entreprises qui souhaitent travailler ensemble. En tant que haut fonctionnaire, être à la tête d’un établissement comme le GPM est un choix qui fait pleinement sens : avoir une utilité sociale, économique, écologique à court, moyen, long terme. On est au coeur de ce que peut l’action publique et c’est un vrai moteur pour moi.
Une femme, présidente d’un établissement public comme le GPM, c’est encore un sujet ?
Je suis contente que vous me posiez la question, parce que j’y apporte aujourd’hui davantage de nuances qu’il y a quelques années. Il y a peu, je vous aurais répondu « non, ce n’est pas un sujet » parce que j’ai rarement ressenti durant mes années de formation ou ma carrière le fait d’être une femme comme quelque chose qui interférait dans mon travail. J’ai grandi avec des garçons, dans un milieu social qui n’était pas aisé, et mes parents ne m’ont jamais empêché de faire quoi que ce soit sous prétexte que j’étais une fille. Mais je dois bien admettre qu’à mesure que j’ai occupé des postes à responsabilités, j’ai réalisé que, peut-être, j’avais eu de la chance et que cela n’allait pas toujours de soi. Aujourd’hui donc, je pense qu’il est nécessaire de témoigner, par et pour l’exemple, du fait qu’une femme est légitime à occuper tout type de poste et à mener la carrière qu’elle souhaite.
Repères
- 1997 : après un diplôme d'ingénieure des TPE et un DEA de sciences politiques, elle intègre son premier poste au ministère de l'équipement
- 2005 : elle décroche sa troisième qualification de niveau Bac +5, avec l'obtention d'un nouveau master d'économie publique des ponts et chausées
- 2008 : premier poste dans une collectivité, au syndicat des transports d'Île de France
- 2013 : elle devient directrice des transports au Conseil régional d'Île de France
- 2016 : elle entre à la mairie de Paris, à la direction de la voirie et des déplacements
- 2019 : elle est directrice exécutive de la société du Grand Paris et devient la première femme présidente (après 350 années d'existence !) de l'Union Nationale des ingénieurs des ponts, eaux et forêts
- 2024 : elle est nommée présidente du directoire du Grand Port Maritime de La Rochelle
Dernière mise à jour : 27 février 2025