Gérard Pont

Il est né du tonnerre de Brest et fut organisateur, fin 70’s, d’un Woodstock à la bretonne. Le premier festival rock planté dans un pré à vaches de ce côté-ci du Channel - Cure, Stranglers, Clash y furent - inspirant pour les Vieilles Charrues, Trans Musicales et autres.

Publication : juin 2024 / Texte : Elian Da Silva Monteiro / Photo : © Julien Chauvet

Libraire puis producteur pour la TV - Morgane de lui ! -, il a repris en main les Francofolies voilà vingt ans et soufflera avec cette édition les 40 bougies du festival rochelais… tout en prenant un peu de recul.

Ce qui signifie ?... Rester sur le seuil, garder un pied dans la porte, ou franchir le pas ?

Ha ha !... Garder un pied dans la porte ! Je reste président, mais je ne souhaite plus être directeur et m’occuper de l’opérationnel. Jean-Louis Foulquier l’a fait vingt ans, je l’ai fait vingt ans, c’est bien de passer la main aux gens qui ont la quarantaine. Le monde et les tendances changent et on a énormément changé les Francofolies en gardant ce qui en a fait le succès. À la nouvelle équipe de faire le travail pour les vingt ans à venir. Mais je ne vais pas les lâcher, tout comme Jean-Louis m’a tenu la main.

Prendre du recul, c’est pour rebondir... Par exemple, sur une école supérieure du spectacle vivant. Quelle est la nature (francofolle) de l’e2sv ?

Un vieux projet. J’ai créé mon premier festival en 77 et à cette époque il n’y avait pas de formation, ni même de festival d’été et on a dû tout apprendre. Aujourd’hui, tout ça s’est extrêmement professionnalisé : contrats, régimes spéciaux, billetterie, data, sponsoring, droits, programmation… Il y a du travail et pas de formation, or ce sont de vrais métiers. Ce serait dommage de ne pas transmettre nos savoir-faire et on a en plus cette chance, avec nos réseaux, de pouvoir placer nos étudiants.

Puisqu’il est question de formation : vous vous êtes formé “sur le tas” au spectacle vivant. On vous voit en jeune homme maigrichon dans le doc sur “Elixir”1 vous activer… Que reste-t-il de lui en vous aujourd’hui ?

À part le physique, tout ! Je suis toujours aussi enthousiaste, aussi gamin, curieux, passionné, fêtard. Je suis guidé par l’émotion du spectacle. Hier soir, je suis allé voir Mika, ce soir Alain Chamfort2, ç’a été et c’est encore toute ma vie. Il n’y a pas un été, depuis que j’ai 15 ans, où je n’ai pas été dans un festival.

Qu’y a-t-il de folie dans les Francos 2024, quelle part avez-vous prise dans cette prog ?

C’est un travail d’équipe. Plus on vieillit et plus on doute, donc j’aime bien travailler en prenant l’avis des autres. Comme folie, il y a cent spectacles, beaucoup d’invités surprises dont on tait le nom et qui vont venir faire des duos, des trios. Et puis Jarre en clôture qui n’est jamais venu et qui va embraser La Rochelle après Houston, Pékin Londres et Paris ! Et Thiéfaine qui a été le premier sur la grande scène en 85 et plein de jeunes nouveaux dont ce sera la première.

Qu’incarne cet anniversaire, et au-delà des 150 000 festivaliers, qu’en attendez-vous ?

En fait, l’anniversaire compte beaucoup pour ceux qui l’organisent, le public, lui, ça lui est un peu égal. Ça nous plaît à nous de marquer ces 40 ans qui sont les deux fois vingt ans : à la fois vingt ans Foulquier et vingt ans Pont (et quand je dis ça… c’est pas de La Poste ! Ha ha !). Y en pas beaucoup des festivals qui ont 40 ans en pleine santé ! C’était pas évident de succéder à Foulquier, mais je pense qu’il serait content de voir les Francos rayonnantes, aujourd’hui et dans sept pays dans le monde.

Et pour finir, justement… Un souvenir de lui ?

Rien de moyennement racontable, Ha ha ha!... Ce qui m’a plu, avec lui, c’est que même quand je me trompais, il me soutenait. Il a toujours été un vrai guide, et si parfois on se prenait la tête c’était un bon signe parce que c’était un mec hors normes. Sacré bonhomme ! On pouvait s’engueuler mais c’était accessoire. Il m’a choisi et je ne sais toujours pas pourquoi !

Et pour finir une deuxième fois : où vont vos coups de coeur artistiques ?

J’aime beaucoup Zaho de Sagazan mais il va aux plus anciens. J’irai voir Souchon, Thiéfaine… Et comme on met aussi l’accent sur les langues de France, j’irai voir les basques, les occitans, les bretons, ça me plait beaucoup. J’irai voir Daho, et ce que fera Sting qui n’a rien à faire normalement aux Francos mais qui fera des duos avec des chanteuses et des chanteurs français. J’irais voir aussi Nicolas Peyrac, et même si je suis moins à l’aise dans le rap, j’irai voir Big Flo et Oli. Et l’année prochaine je n’aurai plus de discours à faire, alors j’irai voir les spectacles, peinard !

Repères

  • 6 janvier 1956 : naissance à Brest
  • Lycée Kerichen, puis diplôme de l’École supérieure de commerce (Brest)
  • 1979-1985 : directeur de la librairie Dialogues
  • 1979-1986 : producteur des festivals Élixir et Rock in Athènes 
  • 1986-87 : journaliste animateur à France 3
  • 1987-1990 : responsable communication Relais H
  • 1990 : fondateur dirigeant du groupe Morgane pour la captation de spectacles vivants et la production d’émissions audiovisuelles
  • 2005 et depuis : directeur artistique et président des Francofolies
  • 2017 : réalise avec Jérôme Bréhier le documentaire “Elixir, le jour où les Clash sont venus chez nous” sur la 4e édition de ce fameux festival, un livre du même titre paraît chez Coop Breizh (réédité en 2023)
  • 2024 : fête les 40 ans des Francos et lance l’e2sv
  1. “Elixir, le jour où les Clash sont venus chez nous”
  2. L’interview a eu lieu le 26 mars

Dernière mise à jour : 10 juin 2024

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