Stéphanie Meylon-Reinette
Catégorie(s) : Ils ont séjourné ici
Guadeloupe
Du 1 septembre au 4 novembre 2024
Discipline
Danse, Poésie
Biographie
Stéphaine Meylon-Reinette,aussi connue sous le nom de Nèfta Poetry (en tant que poétesse et artiste) est une performeuse, danseuse-choréraphe, militante culturelle, universitaire indépendante et surtout chercheuse. Ses travaux explorent les sociologies de la Caraïbe française et des Amériques.
Notre rencontre avec Stéphanie
Des ponts entre des îles
Dans le bureau de Stéphanie Melyon-Reinette à la Maison des écritures, il y a une île. La lumière du soleil éclaire les murs blancs, on est d’abord un peu ébloui, comme quand on regarde une mer étale, ça sent la térébenthine, c’est inhabituel, et alors, on aperçoit une île. Un îlot unique, dont le socle géologique prend la forme d’un bureau, mais qui se présente ce matin comme un espace luxuriant, foisonnant, débordant de dessins, d’écrits, de notes, d’esquisses, sur le plateau, sous le plateau (on veille à ne pas mettre les pieds sur les peintures en train de sécher), et l’on comprend que Stéphanie n’a assurément pas perdu son temps depuis le début de sa résidence : « Après une première résidence effectuée l’été dernier à Ísafjörður, en Islande, je suis aujourd’hui à La Rochelle dans une phase de défrichage, pour poursuivre mes recherches sur l’insularité. J’interroge la figure de l’île, à la fois en tant qu’espace bio-géographique, mais aussi en tant que lieu de mémoire, porteur d’une dimension spirituelle. »
Les pertuis et les îles du littoral charentais alimentent la réflexion de Stéphanie sur les questions de l’enfermement et de l’ouverture, de l’extériorité et de l’intériorité, jusqu’à l’intime. « Le projet s’intitule Insulé·e·s. Je cherche des indices, des connexions d’une île à l’autre. Entre la Guadeloupe et l’Islande, il a pu s’agir par exemple de la présence de sargasses et d’un rapport que j’appelle « a-biotique », c’est-à-dire artificiel, au milieu géographique. Ici, il pourra peut-être être question de la circulation et de l’entremêlement des eaux douces et des eaux salées dans les marais littoraux. Ou encore de la permanence de figures féminines dans les espaces maritimes, qu’elles prennent une forme mythologique, avec la figure de la sirène par exemple, ou des aspects beaucoup plus prosaïques, autour de communautés de femmes, tantôt organisées, tantôt recluses. »
Pour rendre compte de son travail, l’artiste guadeloupéenne, tout à la fois chorégraphe, peintre, poète, sociologue… revendique une démarche transdisciplinaire de « recherche-action ». Elle participe tout aussi bien, en tant que chercheuse indépendante, à des colloques universitaires internationaux, qu’à des performances artistiques intéressant tous les arts. « Cela rassurait mes parents que je fasse des études, et j’ai donc soutenu une thèse de doctorat, mais je savais que ce que je souhaitais réellement explorer, c’était la façon dont l’art contribue aux questions de société. On a longtemps cantonné les pratiques artistiques dans le champ du divertissement, mais pour moi, il est clair que l’artiste est un chercheur : il se documente, il explore, il formule des hypothèses, s’entoure de concepts, expérimente, restitue. Quand j’interviens dans un colloque, je ne m’excuse pas de ce que je propose en tant qu’artiste. »
Depuis plusieurs années, Stéphanie est une des chevilles ouvrières du festival international Women Scream – Cri de femmes, où elle milite pour une représentation inclusive et engagée des voix féminines. « C’est une manière pour moi de poursuivre mes réflexions, en étant beaucoup plus libre et bien moins contrainte que dans un cadre universitaire. » Ce festival, qui célèbre les artistes femmes à travers le monde, reflète l’engagement féministe de Stéphanie, central dans ses œuvres et dans ses ateliers.
En quittant le bureau, on jette un dernier coup d’œil sur le petit îlot coloré. Le désordre créatif a pris un peu d’épaisseur : les esquisses, poèmes et notes s’y entassent comme autant de fragments, au sein desquels Stéphanie navigue et établit des connexions. Elle explore, elle défriche, elle cartographie un monde en formation. Dans le bureau de Stéphanie Melyon-Reinette, en regardant mieux, ce n’est pas une île, c’est un archipel.
Philippe Guerry
Projets de résidence
Au cours de sa résidence à La Rochelle, l'artiste travaillera sur le projet "INSULÉ.E.S, De la drive à l'incantation, de la dérive à l'incarnation". L'insularité est au coeur de ses questionnements (atlantique noire, sucre/ Bayou, volcanisme et insularité). Après une résidence de deux mois en Islande, elle poursuitson exploration des insularités pour produire un ensemble de propositions plastiques, poétiques et performatives.
Dates à retenir
3 octobre, 18h30: Sous le voile, une île. Danse contemporaine et poésie
Un grand voile. Papier. Crayon. Voix.
En quelques heures, nous tenterons de mobiliser corps et voix pour générer une expression de son insularité intérieure.
Qu’est-ce qu’une île ? Qu’est-ce qu’être insulaire ? Insulé.e. ?
Entre danse, (socio)poétique, et écritures, Sous le Voile, une île relèvera de l’expérimental et de l’empirisme, du témoignage, de la catharsis.
Partenariats
Résidence en deux temps dans le cadre d’une convention avec la Cité Internationale des Arts à Paris.
Photo ©Daniel Dabriou