Manon Barbeau

Catégorie(s) : Ils ont séjourné ici

Canada

Du 15 novembre au 15 décembre

Discipline

Cinéma Documentaire

Biographie

Manon Barbeau est réalisatrice d’une dizaine de documentaires plusieurs fois primés, dont le très médiatisé Les enfants de Refus Global. La cinéaste a également cofondé le Wapikoni mobile en 2004 et fondé Musique nomade en 2006, studios ambulants de créations cinématographiques et musicales destinés aux jeunes des Premières Nations et autres communautés vulnérables. En 2014, Manon Barbeau a été nommée Officière de l’Ordre national du Québec et a reçu le prix Albert-Tessier, la plus haute récompense en matière de cinéma au Québec. En 2016, Manon Barbeau a été nommée Membre de l’Ordre du Canada. Elle est actuellement présidente de la Cinémathèque québécoise.

Notre rencontre avec Manon

Donner voix aux silences

 

Tout ne se passe pas toujours comme prévu. Ce pourquoi il faut documenter. Parfois, on entame sa résidence un peu malade. On fait avec. Loin de s’en affliger, Manon Barbeau a rapidement décidé de passer outre : si elle est présente, pleinement présente, à La Rochelle, c’est pour donner du souffle, de l’air, de l’oxygène à un projet qui lui tient à cœur. Et puis après tout, composer avec les aléas ne lui fait pas peur, c’est même l’essence de sa pratique.

 

Documentariste de renom, présidente de la Cinémathèque québécoise, Manon Barbeau est accueillie à La Rochelle pour écrire le scénario de son prochain documentaire. Elle s’attelle, ici, à écrire le synopsis et à poser les fondations de son film. Son nouveau projet s’intéresse aux rencontres entre des danseurs et les résidents de Centres d’hébergement et de soins de longue durée au Canada. Des échanges qui opèrent par le toucher et le mouvement, avec une infinie tendresse, et qui permettent de communiquer et de transmettre de l’émotion au-delà des mots. Au cœur du dispositif, la chorégraphe Ariane Boulet, figure de proue du film qui, par cette approche sensible, questionne les liens que le corps entretient avec la mémoire. En tant qu’observatrice, Manon veut se placer en léger retrait pour laisser ces dialogues muets s’installer, se dérouler, et tisser la trame de son récit.

 

Mais avant de filmer tout ce que le non-verbal peut venir combler, il y a bien des mots à aligner. Concilier les exigences d’un dossier scénaristique à l’incertitude propre au cinéma documentaire est un exercice particulier. Contrairement à la fiction, le réel échappe toujours un peu : on ne sait pas à l’avance ce qui se passera lors des prises de vue. Pourtant, il faut déjà poser une structure narrative, établir des intentions, préciser ce que l’on souhaite capter. Pour Manon, la résidence a cette fonction.

 

Fondatrice de Wapikoni Mobile, un studio ambulant qui donne une voix et des outils audiovisuels aux jeunes des communautés autochtones, Manon Barbeau a toujours exploré les marges, là où les histoires vibrent et interpellent. Récompensée par de nombreux prix internationaux, elle a su imposer une signature où l’intime croise l’universel.

 

« Le fil rouge, dans mon œuvre, je commence à le percevoir de mieux en mieux. Mon histoire familiale un peu particulière fait que je me suis intéressée toute ma vie aux exclus et aux abandonnés. J’ai réglé ma propre histoire dans Les Enfants de Refus Global, puis j’ai donné la parole à d’autres invisibles : à des détenus, à des jeunes punks à la rue, aux autochtones – qui sont les abandonnés parmi les abandonnés – et aujourd’hui, aux vieillissants, à ceux qui n’ont plus de mots, de paroles, de mémoire. Je crois que tout cela est finalement très cohérent. »

 

La résidence rochelaise de Manon, malgré ses imprévus, marque une pause bienvenue dans un parcours dense. La tranquillité de la Maison des Écritures – et les variations automnales de nos vents – offrent un cadre idéal pour façonner ce projet scénaristique. Plus qu’un simple exercice de narration, l’écriture de son scénario donne forme ici à une structure, à un espace ouvert qui laissera sa place à l’imprévisible, à la magie des rencontres, aux petites épiphanies.

 

C’est dans cette part d’incertain que le cinéma documentaire trouve sa vérité, et sa beauté. Faire place à l’inattendu, à ce qui n’était pas encore écrit, accepter le souffle d’abord coupé avant d’être repris, c’est aussi ce qui guide l’écriture de Manon Barbeau. C’est ainsi : tout ne se passe pas toujours comme prévu. Ce pourquoi il faut documenter.

 

 

Philippe Guerry

Projets de résidence

Lors de sa résidence à la maison des écritures, Manon travaille sur l'écriture d'un roman J’ai des cailloux-filles dans ma chaussure et  sur le scénario Les jeux du crépuscule.

Date à retenir

Mardi 10 décembre, 18h30:RENCONTRE ENTRE DOCUMENTARISTES AVEC KALINA NIKOLOVA ET MANON BARBEAU

Bulgarie, Québec, Kalina Nikolova, Manon Barbeau : partez à la rencontre de deux regards croisés sur le film et l’écriture documentaire, sujet de travail de ces deux artistes reçues en résidence à la Maison des Écritures cet hiver.

Partenariat

Une résidence portée en collaboration avec Ciné Corps

Photo ©Timothé Favreau